« Février neigeux, été avantageux » (vieux dicton paysan)

Ouillage

Il vente et il neige à gros flocons, aussi par cette froidure, nous avons interrompu la taille pour reprendre des activités à l’abri.
Entretien du matériel pour la belle saison à l’atelier, papiers administratifs au bureau et dodine, bâtonnage et ouillage dans les chais.
C’est Delphine qui assure cet ouvrage depuis 3 ans, maintenant.

dodine
Après fermentation alcoolique, les levures et les lies se sont déposées au fond des barriques.
Aussi, afin de remettre les levures en activité et d’apporter de la complexité, de la rondeur et du gras aux vins, on brasse les lies avec une dodine (tige en inox qui se termine par une sorte de spatule perforée) dans le but de remettre ces sédiments en suspension et en large contact avec le vin.

batonnage

C’est ce que l’on nomme plus communément le bâtonnage, que nous effectuons tous les 8 – 10 ou 12 jours, en fonction des caractères des vins désirés.

batonnage…………………………. AVANT – Bâtonnage => APRES ……………

Ouillage-Filling-Barrels Cette opération de bâtonnage terminée, quand le vin a été bien agité (voir l’opacité des lies remises en suspension dans le verre de droite…), brassé et que les lies sont intimement liées au vin, nous effectuons ensuite un ouillage qui consiste à remplir les barriques afin d’éviter les vidanges ( la part des anges = partie du vin absorbée par le bois) – les vides d’air qui provoquent de l’oxydation, voir même de l’acidité volatile (piqûre acétique – vinaigre) si on n’effectuait pas ces remplissages – ouillages hebdomadaires.

logo-Seve

L’association Sève, les vignerons amis de Joseph Capus, ouvre son Site.

« Sève est une association nationale de vignerons se reconnaissant dans la notion d’Appellation d’Origine Contrôlée, pensée et construite par le sénateur Joseph CAPUS dès le début du XXe siècle.
Les vignerons de SEVE s’inspirent de la pensée de cet homme qui n’eut de cesse de construire un système cohérent et capable de rendre compte de la diversité et de l’originalité des vins produits dans les grands terroirs français… »

Cette association nationale de vignerons, de toutes les régions viticoles, définie ainsi son fondement :

 » Fédérer les vignerons engagés dans des modes de culture et de vinification respectueux de l’environnement, aboutissant à des vins originaux et authentiques, représentatifs de leur terroir dans l’esprit originel de l’AOC, respectueux des consommateurs. Obtenir la refondation des AOC sur cette éthique : qualité, originalité, respect de l’environnement, agriculture durable et solidaire, respect du consommateur. »

Plus d’informations : Association SEVE

scaphoideus-titanusLe premier cas de flavescence dorée détecté sur le terroir de Mareuil-le-Port en Vallée de la Marne, à l’automne 2005. C’est le dernier bulletin du SRPV Champagne – Ardennes qui nous alerte de ces symptômes préliminaires de *jaunisse* diffusée par la cicadelle scaphoïdeus titanus vecteur de cette calamité.
Une première analyse de cette maladie, détectée sur un jeune cep de 3 ans, semble révéler que l’origine de la contamination proviendrait d’un porte-greffe infecté avant plantation.

Un prochain arrêté préfectoral va définir un périmètre de lutte obligatoire sur ce secteur.
La SRPV recommande à l’ensemble des vignerons champenois de renforcer la surveillance de leurs *galipes* (patois champenois = parcelles de vigne) à l’automne et de requérir aux pépinièristes de plus amples garanties sanitaires.

Ce n’est pas une bonne nouvelle en ce début d’année.

 » La flavescence est impossible à traiter lorsqu’elle est déclarée : une souche touchée est condamnée. Seuls moyens de lutte : arracher et traiter contre la cicadelle, vecteur de la maladie. »
Source : Jeunes Agriculteurs Magazine Web – La cicadelle, ennemie à abattre

Les moyens de lutte sont des insecticides de synthèse en culture conventionnelle, et la roténone en culture biologique en France.
Ailleurs, dans les autres pays européens, en complément de la roténone, le pyrèthre est aussi autorisé et préconisé en culture biologique.
Voir là,
concernant les conclusions tirées d’essais de lutte en culture biologique:

 » Le principal résultat de cet essai est la mise en cause de l’efficacité de la roténone, puisqu’il s’agit du seul insecticide autorisé en agriculture biologique en France pour lutter contre la cicadelle de la flavescence dorée. Dans le cas d’une maladie de quarantaine, avec traitements insecticide obligatoires contre le vecteur, c’est particulièrement gênant. Le pyrèthre, homologué au cahier des charges européen mais pas en France, semble être une alternative intéressante (si les résultats de cet essai sont confirmés par d’autres). Le problème de l’homologation de ce produit est plus politique et économique, malheureusement, si bien que l’utilisation du pyrèthre par les agriculteurs biologiques en France risque de mettre un certain temps à être autorisée. C’est regrettable, puisque la lutte contre la cicadelle, elle, continue de poser problème aux viticulteurs biologiques. »
Source : Civambio33 – Culture BIO et Flavescence dorée

J’ignorais que le cahier des charges Bio était différent d’un pays européen à un autre. ? ? ?
Etonnant !
Pourtant, il s’agit de la même la nature, du même environnement … du même continent européen … ???
Alors, suivant le pays de la CEE,
on serait plus ou moins Bio ?
ou plus ou moins européen ? … ? ? ?
Humanité complexe.

La Flavescence dorée et la Biodynamie,
les sentiments et l’avis de Jacques MELL – Biodynamie Conseil à Reims :

 » …La lutte contre le mycoplasme étant considérée comme impossible, tant par les responsables de l’agriculture dominante que par ceux de la culture biologique, la méthode utilisée actuellement consiste donc à éliminer le vecteur, c’est-à-dire la cicadelle…
Une fois de plus, on ne s’attaque pas à la cause, mais à un tiers, c’est plus simple dans la lutte et plus confortable dans la tête, puisqu’on n’a pas à se remettre en cause. …
L’analyse des symptômes révèlent, incontestablement, une faiblesse des processus chaleur et lumière dans le végétal, et un manque de vie dans le sol… »
Lire la suite : Biodynamie-Conseil-Blog

Pour nous, vignerons champenois septentrionaux, la flavescence dorée c’est tout nouveau.
Aussi, pour mettre en alerte les amis *champagnards* et trouver des solutions,
plus d’infos sur cette maladie:
SRPV Midi Pyrénées – Flavecence dorée
INRA – Scaphoideus titanus Ball
ITV Midi-Pyrénées – Flavescence dorée
Civambio33 – Culture BIO et Flavescence dorée – Méthode douce
Jeunes Agriculteurs Magazine Web – La cicadelle, ennemie à abattre

PHOTO SOURCE : SRPV Midi-Pyrénées

307.498.553 bouteilles de champagne commercialisées en 2005,
c’est le chiffre que nous révèle notre quotidien régional, le journal L’Union.
D’une autre source émanant de notre corporation / CIVC :
une progession des ventes 2004 / 2005 établie à + 2,07 %
qui se répartissent comme suit :
France : – 0,7 % (- 126.208 bouteilles)
Export Europe – CEE / EEC : + 4,62 % (+ 3.563.888 bouteilles)
Export – Pays Tiers : + 6,11 % (+ 2.798.760 bouteilles)

Le consommateur français a un peu boudé nos nectars pétillants… mais bon, ne dit on pas qu’on est souvent meilleur prophète à l’étranger que dans son propre pays … (?)
Cependant, le record des ventes 1999, les fêtes du millénaire, de 327 millions de bouteilles n’a pas été battu.

Aussi, c’est sans triomphalisme, au regard de la morosité et de la crise profonde qui touchent les autres régions viticoles françaises, que je prends connaissance de ces chiffres.
J’ai en mémoire l’envolée des ventes champagne de la fin des années 80, qui ensuite s’est soldée par une période de vaches maigres, de méventes dans les années 90 jusqu’à la veille des fêtes du millénaire. Fêtes du Millénaire qui ont relancé la consommation de notre élixir pétillant régional.
Dans ces années là, fin des années 80, le prix du raisin très convoité avait flambé, ce qui avait eu pour effet une augmentation importante du prix de la bouteille, que par la suite le consommateur a délaissée, dans les années 90.

Cette prospérité inquiète les économistes (ce qui peut sembler paradoxal), la perspective d’une augmentation identique des ventes les prochaines années causerait d’éventuelles ruptures de stocks ou de production, soit un *remake* des années 80 / 90.
Les acteurs influents du monde champenois ( présidents des négociants, des vignerons, des coopératives et délégués syndicalistes) estiment que la Champagne peut produire 360 millions de bouteilles pour un rendement de 13.000 kilos / Ha, sur les 32.178 hectares (source CIVC – 2002) que compte la surface du vignoble champenois actuel.
Aussi, une augmentation de l’aire de production AOC Champagne n’est pas envisagée avant 10 ans.
Ce qui me parait une sage analyse, car si demain la Champagne était touchée par la même crise qui affecte les régions viticoles voisines, une surproduction causerait probablement des situations économiques encore plus difficiles à gérer qu’une simple limite des rendements, qui, par ailleurs, avait été appliquée dans les années 90 pour corriger les méventes.

Taille-Vigne-en-foule-1900
En consultant mes archives, j’ai retrouvé une vieille carte postale datant de 1900 : la taille de la vigne cultivée « en foule », à cette époque là, avant l’invasion du phylloxera.
On apperçoit, en premier plan sur la gauche, ainsi qu’en fond dispersées dans les coteaux, les *moyères*, ce sont des tas d’échalas- de *bûchottes* (en patois *champagnard*) disposées en V.
Chaque pied-cep de vigne (à l’époque la densité moyenne de culture en foule avoisinait 50 à 60.000 ceps à l’hectare ) comportait une bûchotte, sur laquelle on allait lier le brin de taille. Après vendanges, ces tuteurs – bûchottes étaient ôtés de terre pour être mis en moyères, afin d’éviter que l’extrémité de la fiche située dans le sol humide ne pourrisse tout l’hiver.
Au printemps, après la taille et le premier labour – *la bêcherie* ou *hourie* faite à la main à l’aide d’un *croc* ou d’un *houyau* selon les régions, les vignerons fichaient une bûchotte à chacun de ces pieds de vignes.
C’est ensuite après l’invasion du phylloxera, et qu’il ait fallu replanter les vignes avec des plants greffés, que la culture de la vigne se fit en ligne, ce qui permit de travailler au cheval, puis ensuite au motoculteur et à l’enjambeur.
A cette époque, les bois de taille étaient sortis de la vigne, on apperçoit sur la droite, la mule chargée de sarments, qui serviront à faire de belles flambées dans la cheminée, le soir à la veillée.

Concernant la période de taille la plus adaptée, j’ai retrouvé par ailleurs, des recommandations établies au XVIII eme siècle, par Frère Pierre, bénédictin et successeur de Dom Perignon à l’Abbaye d’Hautvillers, qui écrivait à cette époque dans son « Traité des Vignes de Champagne »:

 » On ne doit pas commencer à tailler avant le quatorze de la lune de Février, sinon la Vigne est exposée à souffrir et même à mourir, s’il survient des frimats, d’abord après qu’elle a été taillée. L’avidité de gagner dans les Vignerons leur fait entreprendre plus de Vignes qu’ils n’en peuvent façonner; ce qui les engage à tailler dez le mois de Janvier. »

et de prodiguer ses conseils éclairés, sans perdre la finalité économique … :

« Il faut mépriser la quantité qui ne fait que du vin très commun et viser toujours à la qualité qui fait bien plus d’honneur et de profit. »

Depuis un siècle, les techniques culturales ont bien changé – évolué (?), le paysage et l’environnement aussi.
C’est ce qui m’a le plus choqué, le plus ému.

À la Saint-Vincent
L’alouette prend son chant
Et le vigneron son serpillon…

Le Cordon de Royat:

Taille-Royat-pruningLe système de taille le plus répandu en Champagne sur les 3 cépages, cependant appliqué en grande majorité sur le pinot noir, très fructifère.
Il s’établit sur une vieille charpente en laissant des coursons espacés de 15 centimètres à 2 yeux (bourgeons à fruit) pour le pinot noir et meunier et 3 yeux pour le chardonnay.
Le prolongement terminal se taille à 4 yeux pour le pinot noir, le plus fructifère, et 5 yeux pour le pinot meunier et chardonnay.
Le rachet (rachai), crochet ou pisse-vin ( en jargon *champagnard*) se taille à 2 yeux sur un gourmand à la base du cep, la vieille souche. C’est sur ces rachets-rachais qu’on établit les nouvelles charpentes de rajeunissement.
Temps évalué de taille complète pour 1 hectare de Royat: 180 heures.

Le Chablis:

Taille-Chablis-pruningLa taille qui s’applique au chardonnay, car les 2 premiers bourgeons à la base du prolongement ne produisent très souvent que des feuilles.
Elle s’établit sur des charpentes espacés de 30 centimètres, avec chacune un prolongement de 5 yeux pour les cépages chardonnay et meunier, limité à 4 yeux pour le pinot noir très productif.
Le rachet / rachai se taille à 2 yeux.
Temps évalué de taille complète pour 1 hectare de Chablis: 220 heures.

Le Guyot simple ou double:

taille-guyot-pruningCe système de taille est interdit en 1er Cru et Grand Cru ( de 90 à 100 % ).
Le guyot double s’établit sur 2 baguettes ( bois fructifère issu du rachet / rachai / crochet / pisse-vin) de 8 yeux et 2 rachets à 2 yeux.
Le Guyot simple comporte une seule baguette à 10 yeux et un rachet à 3 yeux.
Temps évalué de taille complète pour 1 hectare de Guyot: 180 heures.

Taille Vallée de la Marne

Taille-vallee-de-la-marne-pruningCette taille se trouve particulièrement adaptée dans les zones gélives. En effet, le prolongement et la baguette ne sont *abaissés* et liés sur le fil qu’après la période critique de la lune rousse, ce qui permet d’épargner du gel les bourgeons des extrémités, les plus haut placés, les plus éloignés du sol.
Très localisé, de coutume ancestrale, en *petite* Vallée de la Marne, ce système de taille s’établit exclusivement sur pinot meunier avec un rachet de 3 yeux, une baguette de 9 yeux et un prolongement de 6 bourgeons.
Cette taille est interdite en premiers et grands crus.
Temps évalué de taille complète pour 1 hectare de Vallée de la Marne: 180 heures.

Ainsi, voilà quelques schémas de taille qui permettront à des amis passionnés – jardiniers du Nord, de la région parisienne, de Poitiers, de l’Est et de Belgique, vignerons du dimanche, d’établir la taille de leurs quelques ceps ou de leur treille (cordon de royat) chérie.

Plus d’infos, de vidéo et de schémas:
-En Photos et très pédagogique: Site de M. Veron du Lycée Viticole d’Avize
-En Vidéo: Site du CIVC-Champagne.fr
Les Beaux Jardins – Taille de la vigne et treille
Pépinières Chauvin – Taille de la vigne et treille

– Schémas (adaptés de mes mains – et l’aide précieuse d’un logiciel de dessin) Source : CIVC – INAO
– Temps évalué de taille complète pour 1 hectare – espacement 1 mètre, source : convention collective / Champagne.